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08/06/2009

Où l’architecte américain et le violeur à la tronçonneuse entrent en scène

Une étape de ma découverte de la Pennsylvanie – mais si ça fait rêver ! – devait me mener à 1 heure de Pittsburgh – mais si y’a des choses à faire dans cet ancien fleuron de l’industrie américaine, Warhol en est originaire et on lui a donc consacré un musée…bon pas incontournable, je le concède. Je me rendais donc à une heure de Pittsburgh pour visiter les réalisations phares du célèbre architecte Frank Lloyd Wright. Monsieur Wright, ne s’est pas contenté de dessiner le très design musée Guggenheim de New York, il a également consacré une grande partie de sa vie à concevoir des résidences pour de riches particuliers, des années 30 aux années 50.

Or l’Est de la Pennsylvanie abrite trois des œuvres majeures du maître. Il n’en fallait pas plus pour me décider à aller prospecter dans la région.

 

Je me voyais confortée dans ma décision par une invitation bienvenue et inespérée de dormir dans l’une de ces maisons-musées, transformée en guesthouse de grand luxe. De quoi me mettre de bonne humeur…voir de me délecter d’annoncer à mon entourage averti que j’allais séjourner dans une des demeures conçues par une des stars mondiales de l’architecture. Quel manque de clairvoyance. 

 

Cet enthousiasme bien puéril, c’était avant de réaliser que la Pennsylvanie est une sorte de Lozère, un trou donc. Avant de réaliser aussi que le climat y est très rude. N’étant après tout qu’à 4 heures de DC, je n’imaginais pas que le dit-trou bénéficiait d’un microclimat le gratifiant en hiver de chutes de neige aussi abondantes qu’en Alaska. J’avais donc décidé sans couteau sous la gorge de me rendre dans une sorte de massif central recouvert d’un honnête manteau de neige. Mouais…

 

Mais le pire voyez vous c’est surtout que Monsieur Wright, que j’aime déjà beaucoup moins, a eu le bon goût de construire l’habitation où je suis censée me délecter de passer la nuit, au fin fond d’une forêt à distance bien trop raisonnable du moindre voisin…et seuls de petits chemins recouverts de neige y mènent – il faut ici que je mentionne que j’avais loué une voiture – la moins chère forcément, et sans pneus neige donc.

Tant bien que mal je manœuvre…avec cette arrière pensée que j’essaie de chasser ; si il venait à neiger beaucoup cette nuit, je pourrais bien me retrouver coincee dans ces maudits bois.

 

Jusque là, on ne peut pas dire qu’on soit dans l’aventure de l’extrême certes, quelques désagréments seulement…ca m’amuse presque encore et puis je me projette déjà devant une belle cheminée à siroter un cidre chaud (mauvaise traduction littérale) avec les autres hôtes de la maison.

 

C’était avant de découvrir une fois atteinte ma maison perdue au fond des bois que je vais être seule à occuper cet espace gigantesque qui ferait un cadre parfait pour un film d’horreur de deuxième partie de soirée. Tous les ingrédients sont là, maison isolée plus nuit plus neige plus jeune femme seule…la misère.

En de hors des loups/ours/grizzlis et autres yetis qui me guettent forcément, personne ne me verrait faire volte face et fuir vite et loin. Mais voilà dans un élan de maturité déplacé, je me dis que j’ai plus de 30 ans, qu’il est temps de cesser ces enfantillages. Fière de moi, j’ouvre la porte.

 

Hélas, je vais de charybdes en sillas. Première constatation – et j’en aurai la confirmation le lendemain en découvrant son bijoux non loin de là en écoutant religieusement la visite – ce maudit Wright avait pour principe directeur de construire des habitations qui s’intègrent dans la nature, constituent un lien avec elle….et quoi de mieux qu’un aquarium géant pour profiter de la nature, hein ! Au diable les murs, vive les baies vitrées. Le coup de grâce.

 

Je suis donc au beau milieu d’un aquarium, livrée au regard de tous les grands malades qui forcément ont élu domicile dans ces bois et n’ont d’autre programme ce soir que de faire de moi leur victime. Et dans le coin, le grand malade pourra s’en donner à cœur joie sans craindre d’éveiller l’attention de quiconque en dehors des loups à qui, remarquez, il pourra donner les restes une fois qu’il en aura fini avec moi.

 

Etat d’esprit au poil, j’ose à peine respirer…quand soudain mon cœur s’arrête, un énorme bruit vient de ce qui doit être une cave. C’est sûr je vais mourir dans d’atroces souffrances. Le second puis le troisième bruit identiques me sortent de ma paralysie et leur régularité a la vertu, après m’avoir presque tué, de me faire comprendre qu’il doit s’agir du chauffage. Après 15 bonnes minutes d’une réflexion qui me semble très intense et la mise de côté d’une première hypothèse qui consistait à allumer toute les pièces, je décide donc qu’il vaut mieux tout éteindre afin de ne pas me livrer aux regards de tous les fous qui c’est certain doivent déjà me guetter.

 

Vous pourriez me dire à juste titre, pourquoi ne pas simplement avoir tiré les rideaux… ? Et oui moi aussi j’avais eu cette idée de génie mais malheureusement dans sa folie écolo-architecturale cet enc…é de Wright a cru bon de ne pas entraver la communion de l’hôte avec la nature avec quelques morceaux de tissus….ça rend décidément con la nature.

Même dans la salle de bain, pas la moindre protection. Alors je sais que certains d’entre nous apprécient de faire leurs besoins dans la nature (ou plus généralement un pipi matinal sur les 3 graviers du micro jardin dans leur lotissement de banlieue) mais bon je ne fais pas parti des lecteurs férus du best seller, « de l’art de chier dans les bois ».

 

Les conditions sont donc toutes réunies pour que l’encombrant violeur à la tronçonneuse fasse sa réapparition dans ce trou du cul du monde des Etats-Unis. C’est donc en pensant à lui, forcément caché dans les fourrés et à l’affut, que je me glisse dans mon lit en gardant mon bonnet (oui, j’ai basculé dans l’irrationnel, me voilà en train d’optimiser mon camouflage)…je décide d’allumer la télé pour atténuer les bruits divers. Oh la malheureuse ! je me ravise immédiatement en réalisant que c’est donner un indice de ma localisation dans la maison à mon bourreau. Une version customisée d’un mélange de Massacre à la tronçonneuse et Orange Mécanique défile en boucle dans ce qui me reste de cerveau.  Mon unique distraction consiste depuis mon bocal, à regarder se balancer les longues branches des arbres dans la nuit………………………ahhhhhhhhhhhhhhhhhhhh

 

N’y tenant plus, je faix une croix sur le bustier en cuir rouge lacé de Wonder Woman, ok je suis super forte, je peux manquer de mourir dans un bus où se déroule régulièrement des fusillades aux Philippines, me retrouver dans des villages du bout du monde sans savoir où dormir, mijoter dans ma crasse et marcher seule pendant des jours à me nourrir de raisins secs …mais pour une raison obscure, les grandes maison isolées c’est juste pas possible.

Ravalant ma fierté, je prends mon téléphone, une aubaine il marche – même les pecnos profitent de la technologie – et appelle le Dr Forman en pleine nuit, pas pour un vêlage, mais pour une rapide recherche sur internet d’un motel dans les parages. J’arrive à peine à sortir de mon lit tellement l’angoisse a pris le pas sur la réflexion…je remballe mes affaires et là dernier obstacle…me jouer du grand malade qui m’attend forcément avec une tronçonneuse à la main ou une hache si il est vraiment arriéré – dans le coin on sait jamais.

Ma voiture est pourtant tactiquement garée à environ 10 mètres de la porte, mais ça laisse tout de même au grand malade tout le loisir de m’égorger…n’écoutant que mon courage, je cours jusqu’à ma Ford en ayant pris soin de la biper depuis la maison pour l’ouvrir. Trop professionnelle, je prends le temps de verrouiller la maison, me livrant un peu plus à l’ennemi, m’engouffre dans la voiture, vérifie que le Grand Malade ne s’y trouve pas déjà, tapi à l’arrière, et démarre, le bonheur.

 

Quelques 20 minutes plus tard, me voilà installée dans un motel moche et impersonnel comme les Américains en ont le secret, la chambre est minuscule, laide à souhait, mal isolée puisque j’entends mon voisin ronfler….je suis aux anges, à peine le temps de me déshabiller que je m’endors déjà, comblée.

 

Tarzan, Christelle, Pierre, Myriam, Quynh-Boi, Laurent…que n’ai-je souhaité ce soir là que vous soyez mes voisins pour me réfugier chez vous comme au bon vieux temps.

 

Anecdote à part, Fallingwater, la star des réalisations de Franck Lloyd Wrigth vaut vraiment le coup, cette demeure datant de 1930 témoigne d'une modernité incroyable pour l'époque, c'est totalement magnifique. Pour ceux que ça intéresse et qui passeraient par là: http://www.fallingwater.org/

 

fallingwater01.jpg

Commentaires

Je ne sais pas si tu as lu "Ni d'Eve ni d'Adam" de Amelie Nothom, mais elle se retrouve perdu dans la montagne Japonaise et vit le même trip que toi. J'ai autant ri en te lisant qu'en feuilletant le bouquin.
Dis le moi quand tu te feras éditer... je serai ta première fane !
Grosses bises à vous, c'est bon d'avoir de vos nouvelles.

Écrit par : Virginie lavalade | 28/07/2009

excellent recit, j espere que tu l as publie quelquepart

Chantale H, de retour des USA

Écrit par : chantale | 31/07/2014

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